Est-il préférable de pédaler en force et à basse cadence, ou en souplesse et à cadence élevée ? Surprise : la cadence idéale n’est pas la plus efficace !
Quelle est la meilleure cadence de pédalage ? La question se pose depuis l’invention du dérailleur. En général, les experts recommandent de faire comme les pros, soit pédaler à environ 90-100 révolutions par minute (rpm) sur le plat, à 95-105 rpm quand les conditions sont rapides (faux plat descendant, vent de dos) et à 75-85 rpm dans les montées.
Pourtant, la cadence où l’efficacité du coup de pédale culmine est beaucoup plus basse : 50-60 rpm ! Pédaler à 100 rpm « coûte » environ 10 % plus d’énergie qu’à 60 rpm, même pour les pros. Les personnes dont l’aptitude aérobie est médiocre ont, quant à elles, spontanément tendance à pédaler à basse cadence. Sans doute un réflexe pour réduire le stress cardiorespiratoire.
Pourquoi recommander de pédaler à des cadences élevées si elles sont moins efficaces ? Parce qu’à 90-100 rpm, la force exercée par les muscles n’atteint pas des pointes aussi élevées qu’à cadence plus basse. Inversement, pédaler à 50-60 rpm mobilise des fibres musculaires à contraction rapide – elles sont plus fortes, mais se fatiguent plus vite que celles à contraction lente. Pas surprenant, donc, que les cyclistes d’expérience et les pros adoptent des cadences élevées qui leur permettent de terminer moins fatigués et de récupérer plus rapidement. D’ailleurs – vous l’avez peut-être remarqué –, depuis l’ère Armstrong, les pros ont tendance à mouliner encore plus vite.
Pas si pros, les pros
Fait étonnant, le pédalage n’est pas nécessairement plus efficace chez les grands de la route que chez les cyclistes du dimanche. Ainsi, on a cru longtemps qu’il était impossible d’améliorer l’efficacité du pédalage. Après tout, c’est un geste où l’on est limité par la mécanique du pédalier, contrairement, par exemple, à ceux de la natation et du ski de fond.
Mais on sait depuis quelques années qu’il est possible d’améliorer sensiblement l’efficacité de son coup de pédale grâce à des séances d’entraînement par intervalles (EPI) comprenant de courts sprints en position assise, ainsi qu’à des exercices de musculation où des charges importantes sont soulevées de façon explosive.
L’erreur la plus courante est de négliger de revenir à un petit braquet après avoir eu besoin de recourir à un grand braquet. L’idéal : maintenir une cadence au-dessus d’environ 90 rpm, sauf en montée.
Ça s'apprend
On peut s’habituer à mouliner à cadence élevée sans inconfort, en faisant, par exemple, des allers-retours dans une côte d’environ 300 mètres. On amorce la montée à une intensité élevée mais non maximale, avec un braquet approprié pour une cadence confortable. Toujours assis, on augmente progressivement la cadence afin de terminer à 100-120 rpm tout en tâchant de pédaler bien rond. Il s’agit de soigner la partie montante du coup de pédale et le franchissement des deux points morts (à midi et à six heures). On peut faire 4 ou 5 séries de 3 ou 4 répétitions, en s’allouant au moins 2 minutes de récupération active entre les séries. En effectuant régulièrement cet exercice, vous améliorerez votre coup de pédale et vous noterez des améliorations, même à cadence moins élevée.
Bref, les fourchettes de cadences de pédalage qu’adoptent spontanément les cyclistes chevronnés sont certes plus coûteuses en matière de dépense énergétique, mais il faut tout de même les préférer aux cadences basses. Jouez avec votre cadence selon que les conditions sont rapides ou lentes, et améliorez votre style à l’aide de brèves fractions d’effort à cadence élevée dans vos séances d’EPI.
Le truc de Guy
Afin d’améliorer votre style, profitez des brèves fractions d’effort de vos séances d’EPI pour pratiquer un coup de pédale bien rond du début à la fin. Lors des périodes de récupération, projetez sur votre « écran mental » une image de vous en train d’exécuter un coup de pédale parfait. Et pour que ce rêve devienne réalité, faites chaque semaine au moins deux séances d’EPI.
Efficacité
Treize cyclistes entraînés (VO2max moyen de 68,4 mL/kg/min) ont effectué quatre tests de six minutes à intensité élevée : sur le plat, en montée (pente de 5,1 %), avec cadence basse ou élevée (60 et 90 rpm). Leur efficacité de pédalage, c’est-à-dire le pourcentage de l’énergie dépensée transformée en travail mécanique, était en moyenne plus élevée à 60 rpm (20,6 %) qu’à 90 rpm (18,1 %), et moins élevée en montée (18,7 %) que sur le plat (20,0 %), des différences qui peuvent avoir d’importantes répercussions sur la performance. Ces observations de terrain vont dans le même sens que les conclusions d’études antérieures menées en laboratoire : la cadence élevée généralement choisie par les grands de la route est moins efficace qu’une cadence plus basse.
Source : Nimmerichter A. et coll. (2015). « Gross efficiency during flat and uphill cycling in field conditions », International Journal of Sports Physiology and Performance (sous presse).