Avec des godasses à 200$, un vélo à 5000$, un manteau en Paclite, une tente ultralégère et des bâtons de ski de fond dont la valeur dépasse celle d’un jeu de pneus neufs sur ma Toyota : dehors, ça coûte de quoi.
Sans parler des droits d’accès pour les pistes, les sentiers. Des taxes pour payer les routes et les parcs nationaux. Rien n’est gratuit. Même pas le temps, qui lui est volé à celui du travail, des obligations, de la famille.
J’ai l’air de râler, mais c’est pour amener la conversation ailleurs, pour ne pas résumer l’expérience de jouer dehors à un mot-clic pourri. J’arrive de faire ma première sortie à vélo dehors cette année, sans même avoir froid, juste avant que ça regèle et reneige.
Chaque fois, chaque printemps, à chaque première sortie à vélo, je ressens la même légèreté. Un véritable sentiment d’exaltation.
Avec les années, l’hiver me pèse toujours un peu plus. Je refuse son froid, ses sautes d’humeur qui glacent ses trottoirs de verglas puis font plonger le mercure. Donc j’ai un peu fatté, presque pas skié, et ma saison de course à pied hivernale s’est éteinte vers la mi-février, point critique de cette saison que j’assassinerais bien si elle n’était déjà morte. J’ai donc roulé en dedans en prévision de la saison de course. Chez moi, et au centre d’entraînement de mon coach, Bruno Langlois. Du temps de qualité sur le vélo, en quantité. Je ne le regrette pas une seconde, je suis en meilleure forme que toutes les années précédentes, du moins si je me fie aux données dont je dispose.
Mais il était temps, pour ma tête, d’enfin sortir dehors.
Mardi, il faisait un temps radieux. Incertain de l’état des routes, j’ai sorti mon vélo de cyclocross du garage, j’ai enfilé mon ensemble hivernal, et je suis parti. Passé Boischatel, l’Avenue Royale était déserte, comme à son habitude. La neige, par endroit, m’arrivait à la hauteur des épaules en bordure de la route. Et sur les hauteurs, je voyais d’immenses plaques de glace qui dérivaient, entre la rive nord et l’ile d’Orléans, au gré de la marée.
Mon souffle était régulier. Mes jambes légères. L’euphorie des premiers tours de pédale dehors et le dopage mental que procure l’air printanier faisaient leur œuvre. Je renouais avec la pureté du geste pour le geste. Sans calcul, sans mon capteur de puissance, sans objectif de temps, de vitesse, de distance. Une ride pour une ride.
Les pensées affleuraient mon esprit puis le quittaient aussitôt. Le boulot de plomberie de la douche. Les textes à préparer. Les lectures. Les clients. Les détails du voyage à venir. Tous les soucis étaient instantanément chassés par la brise.
Et c’est là que je me suis mis à penser au mot-clic #outside is free. Et comment, peu importe son prix, le monde du dehors m’apporte quelque chose d’inestimable. Un sentiment de puissance, de liberté. La sensation de m’appartenir entièrement.
Dehors, n’est pas gratuit, mais c’est la liberté. #outsideisfreedom