« J’ai toujours eu un vélo chez moi. D’ailleurs, j’aimerais profiter de ma présence ici pour demander à l’industrie de créer des modèles plus faciles à transporter et à ranger et avec des pièces faciles à changer », a souligné Tsai Ing-wen dans le grand centre d’exposition de Nangang, à Taipei. La présidente de la République de Chine (à ne pas confondre avec la République populaire de Chine, sa voisine plus conquérante) dirige la destinée de Taïwan depuis 2016 et s’intéresse particulièrement au monde du vélo. C’est elle qui est venue couper le ruban du Taipei Cycle, le plus gros rendez-vous de l’industrie cycliste d’Asie. Il faut dire que c’est plus de 4200 acheteurs internationaux venant de 80 pays qui sont venus découvrir les vélos et les accessoires de demain. C’est ce qu’on appelle de la véloconomie à son sommet. Il y a de quoi être jaloux ; on se prend à rêver d’un Justin Trudeau ou d’un François Legault qui viendrait jeter un œil sur les nouveautés dans un salon du vélo.
C’était une belle entrée en matière dans l’univers cycliste de Taïwan. Voici, en quelques mots, ce que j’ai senti, constaté, vu ou entendu en sillonnant les allées de cette grande exposition.
Sceptique. C’est le premier mot qui m’est venu à l’esprit en voyant des draisiennes à assistance électrique destinées aux enfants. D’accord, elles sont limitées à 8 km/h, mais est-ce vraiment une évolution ?
Unanimité. « On s’attend à une année 2023 très tranquille. En 2020, les gens ne pouvaient faire que du vélo, et en 2022, tout le monde en possédait un récent. Cette année, on est assis sur notre stock. » Ce constat est plutôt unanime. Ce sont cependant les mots de Jimmy Yang, président de Kenda, un fabricant de pneus qui emploie 14 000 travailleurs en Chine, en Indonésie et au Vietnam. Et les pneus de demain ? Il n’a rien voulu dévoiler, sauf qu’il rêve de pneus connectés qui informeraient le cycliste sur la pression, l’état de la route et toute information susceptible d’améliorer la sécurité.
Opportunisme. Lorsqu’un représentant de l’industrie automobile se penche très sérieusement sur le cas du vélo à assistance électrique, il fait preuve d’un opportunisme qui nous réjouit. L’équipementier automobile Valeo propose un moteur qui a le grand mérite d’intégrer une boîte de vitesses. Fini le dérailleur ! La bête à un couple de 130 Nm, ce qui est pas mal pour les besoins d’un lourd vélo cargo. L’avenir est au moteur dans le pédalier, selon Benjamin Morlière, responsable de la plateforme e-Bike de Valeo. « En 2025, il y aura beaucoup plus de configurations avec le moteur dans le pédalier. Seuls les vélos bas de gamme les garderont dans les moyeux », prédit-il. On s’en reparlera ; les routiers adorent la discrétion d’une assistance dans le moyeu arrière.
Développement. L’entreprise québécoise Argon 18 présentait quelques-uns de ses vélos dans le kiosque de son efficace distributeur taïwanais. On pouvait d’ailleurs y voir le nouveau Krypton, un all-road destiné aux routiers qui veulent sortir de la route. Argon 18 poursuit son développement en aménageant une chaîne de montage à Taïwan pour le marché local. Avec 10 000 vélos vendus durant la période pandémique, elle compte bien passer à 45 000 vélos vendus dans le monde en 2025.
Tendance. Les vélos cargos ne font plus figure de marginaux. Plusieurs compagnies, y compris les généralistes, en proposent. Les fabricants de chaînes et de moteurs offrent même des produits conçus spécifiquement pour ces véhicules de la mobilité de demain.
Merci à Taiwan Excellence, qui a permis la réalisation de ce reportage.