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Le blogue de David Desjardins

L’amour des Strade Bianche

28-02-2024

Les routes blanches (ou strade bianche) sont encore plus belles lorsqu’on y est. Surtout à l’automne, quand le vert des arbres et des moissons tardives se mêle aux couleurs argileuses des terres retournées pour l’hiver.

Tandis que le soleil y jette ses premiers rayons du jour, la brume matinale paresse au creux des vallons toscans. Des oiseaux piaillent comme des fous, dissimulés dans la verdure opaque des grands cyprès qui s’élèvent en rangées, comme des flèches dirigées vers l’azur.

Ce sont des routes de campagne, de paysans. Elles sont plus rudes qu’il n’y parait et, à vélo, de nombreuses grosses pierres nous y prennent par surprise à travers le gravier et la poussière. Cette année, le secteur décisif de Sante Marie arrive plus tôt dans la course dont on a changé le parcours. Il est long, pas si abrupte, mais comprend aussi des descentes traitresses.

Encore là, la télé ne rend pas bien la difficulté de ces chemins que j’ai parcouru avec une certaine difficulté par un temps radieux. Dans la pluie, ce doit être une autre affaire.

Les coureurs ne verront pas, comme moi, des lièvres traverser le chemin en courant. Ni des agriculteurs essayant de réparer leur tracteur antédiluvien au bord de la route. Il n’auront pas le loisir de s’imbiber du paysage, de ce pays tellement plus beau vu d’en arrière, mais ils auront le loisir d’entrer dans Sienne sans subir ses hordes de touristes qui m’en ont rapidement chassé.

(Je me répète : si vous trouvez que la montée finale vers la Piazza del Campo parait abrupte, la réalité est comme une claque au visage.)

La Toscane, comme tant d’autres lieux, souffre de sa popularité. Il faut savoir où aller pour trouver un café fréquenté par les gens du coin, la boulangerie locale, la petite épicerie centenaire. Mais bon, en même temps, quand on est là, on fait partie du problème et se plaindre du manque d’authencité qui reste dans ces haut-lieux du tourisme relève de la plus pure hypocrisie.

La course

C’est Strade Bianche en fin de semaine, donc. Cette course toute jeune et qu’on surnomme pourtant le 6e monument (les autres sont Milan-SanRemo, Le Tour des Flandres, Paris-Roubaix, Liège-Bastogne-Liège et le Tour de Lombardie). En raison de son décor, de son parcours, de sa difficulté.

D’abord le décor d’une sportive (gran fondo) nommée L’Eroica, réputée pour l’usage par ses participants d’équipement ancien, elle a rapidement pris du grade et attiré les plus grands coureurs.

La voilà agréablement coincée entre les pré-classiques (Omloop, Kuurne-Brussels-Kuurne) et les premières courses à étapes que sont Paris-Roubaix et Tirreno-Adriatico. Une incontournable.

Tant chez les hommes que chez les femmes, on y assiste à des morceaux de bravoure, du génie tactique, parfois des bagarres épiques dans les derniers kilomètres et souvent des échappées au long cours.

Dans la nature encore dormante d’un hiver qui s’achève, elle déploie ses secteurs non-pavés comme une fierté ancestrale. On se sent privilégié, comme fans, d’avoir accès à une course qui se déroule dans un décor aussi inspirant, comme si on entrait dans le décor plutôt que de le voir de loin, ayant accès à ces chemins qui relient les oliveraies, les vignobles et autres terres arables.

Cette année, on a ajouté de ces chemins de traverse au parcours. La course sera plus dure. Moins propice aux échappées victorieuses. Il faudra monter le raidillon du Tolfe deux fois plutôt qu’une. Tom Pidcock et Demi Vollering y seront pour défendre leur titre. Ce sera la première course de Pogačar cette année (gagnant en 2022), entouré d’une féroce équipe. Je rêve de voir une Marianne Vos (gagnante d’Omloop le weekend dernier) y ravir son premier titre dans un palmarès auquel il ne manque presque que cette course.

Je serai rivé devant la télé. Sans doute en pédalant au sous-sol, puis en alignant les cafés. Je montrerai à ma fiancée où était notre auberge de campagne (deux kilomètres avant Sante Marie). Sans doute que je mijoterai un plan pour y retourner.

Où voir ça?

Plusieurs m’écrivent depuis quelques semaines afin de savoir où l’on pourra voir les courses maintenant que GCN+ a tiré la plogue sur la diffusion des courses. Bonne nouvelle : en plus de toutes les autres, Flobikes a récupéré les droits des épeuves italiennes et présentera Strade, le Giro et tout le tremblement. Mauvaise nouvelle : c’est trois fois plus cher que GCN+ pour l’abonnement annuel. Mais bon, pay for what you love, qu’ils disent. J’en suis. Par contre, à ce prix, nous forcer à regarder des publicités débiles, voilà qui relève de l’injure.

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