L’art et la sécurité routière sont-ils compatibles ? Le premier renforce-t-il la seconde ? Et, pour paraphraser un titre québécois bien connu, si la beauté rendait sécuritaire ?
La peinture est bonne pour votre sécurité : c’est la conclusion d’un rapport étatsunien intitulé Asphalt Art Safety Study paru en avril 2022 et qui s’est penché sur les installations routières artistiques dans des villes. Une quinzaine de traverses piétonnes transformées en oeuvres d’art, des murales disposées aux intersections et des saillies de trottoir peintes ont ainsi été examinées pendant plusieurs années. Le résultat parle de lui-même : les infrastructures intégrant une oeuvre artistique permettent de réduire de moitié les collisions impliquant des gens à pied ou à vélo. Un grand effet pour un petit coup de pinceau !
Un avantage de ces installations – en plus d’embellir notre vie de tous les jours – est leur coût peu élevé. Certes, nos hivers rudes vont nous obliger à les renouveler. Le rapport louange tout de même leur potentiel à aider les « villes à tester des réaménagements permanents de la voirie ».
Ces interventions s’inscrivent dans le cadre plus large de la signalisation routière, accompagnant par exemple des panneaux signalant la présence d’une piste cyclable. On classe ces interventions en trois catégories : confirmation, direction et décision.
Les premières entérinent l’existence d’une piste cyclable, autant pour les cyclistes qui y circulent que pour les automobilistes. Les secondes avertissent d’un changement de direction, par exemple si la piste bifurque sur une autre rue.
Les panneaux du troisième type – décision – manquent cependant cruellement à mon quotidien. Visant à informer de la présence d’un lieu d’intérêt (un parc, un musée, un hôpital…) et du temps nécessaire pour y parvenir (« station de métro à 10 minutes de route », par exemple), ils ont un rôle important à jouer dans la promotion du cyclisme utilitaire.
Julien Desaulniers, ingénieur en circulation et transport à la Ville de Laval, a justement, avec son équipe, installé une quarantaine de panneaux de ce type sur le territoire de la municipalité de banlieue dans le but de pallier un manque de connaissance du réseau – autant de la part des cyclistes aguerris que des autres usagers de la route. L’effet a été immédiat : « Les gens tombent dessus par hasard, et alors ils comprennent que la piste qui passe devant chez eux fait partie d’un plus gros réseau. » En indiquant en temps la distance à parcourir entre les points d’intérêt, les panneaux contribuent aussi à lutter contre la tendance à surestimer la longueur des trajets à vélo, les rendant ainsi moins intimidants. « On veut montrer que le vélo est une solution intéressante », résume l’ingénieur.
Assurément, la signalisation ne sera pertinente que si le réseau est déjà suffisamment étendu. Adéquatement conçue, elle devient même, au final, un élément de marketing tout en participant à la facilité des déplacements : « Regardez jusqu’où votre bicyclette peut vous mener, nous communique-t-elle. Bien plus loin que vous ne le pensiez. »