Ça achève. Le prochain gros coup de vent menace de faire tomber les dernières feuilles. Instable, souvent peu commode, la météo semble sérieusement jongler avec l’idée de nous faire entrer dans la détestable période de l’entre-saison. Novembre. Le mois des morts qui signe aussi souvent la fin de l’année cycliste. Du moins celle que j’aime vraiment.
Comme chaque année, je panique un peu. Je fais entrer le plus de sorties possibles dans mon agenda pourtant surchargé. Quitte à travailler aux aurores ou tard le soir. Quitte à rouler au froid, ou à la pluie avant que celle-ci ne devienne trop glaciale et donc insoutenable.
J’ai ressorti l’attirail qui me parait soudainement moins attrayant qu’au printemps, tandis qu’une sortie à 5 degrés est une bénédiction, une chance de sortir rouler dehors, enfin, après un hiver sous le point de congélation.
Manteaux chauds, couches de base, trois sortes de gants, casques et tuques, chaussettes hydrofuges et couvre-chaussures. Le meuble qui me sert de rangement de vêtements de sport(s) déborde parce que je me refuse encore à le vider de mes oripeaux estivaux. La simplicité d’enfiler un bib et un maillot me manque déjà. Sans parler de la sensation de l’air chaud sur ma peau, à la fin du jour, du film de sueur qui recouvre mes bras et mes cuisses, des arrêts ravito dans les dépanneurs pour remplir les bidons sitôt éclusés, les sorties qui n’en finissent plus, parce que le temps est parfait et qu’il invite à manger des kilomètres jusqu’à frôler l’indigestion.
L’été va me manquer. Terriblement. Tous les automnes, je vis le même deuil. Sortez les violons. Mon coeur est blessé d’une langueur monotone, comme dirait l’autre.
Oui, je vais courir. Oui, je vais skier. Oui, j’ai un fatbike. Mais l’hiver est hostile. Il est imprévisible et capricieux. Il nous impose ses conditions sans trop d’accommodements. L’été, un peu de pluie ne m’empêche pas de sortir, elle est même parfois salutaire. L’hiver, elle peut ruiner toute une fin de semaine. Sans parler des froids polaires qui transforment toute activité extérieure en une sorte d’expérience survivaliste.
Si bien que je passe plusieurs heures, chaque semaine, sur mon rouleau, à regarder des films de merde dont je peux plus ou moins ignorer l’intrigue en m’éreintant à compléter mes entraînements par intervalles. Je ne déteste pas ça. J’aime l’idée de compléter des entraînements payants dans un environnement contrôlé. Mais ce n’est que pour prendre plus de plaisir à rouler dehors l’été enfin (re)venu.
Je suis sorti ce midi, rapidement. Un 50km à toute vitesse, dans ce qui était peut-être le dernier vent chaud de l’année. J’en ai savouré chaque seconde. Chaque coup de pédale. Tous les cyclistes que je croisais semblaient partager cette même félicité doublée du sentiment d’urgence de profiter des beaux jours avant qu’ils ne soient derrière nous.
Peu importe les circonstances, la gravité de la situation, c’est toujours quand la fin approche que l’on mesure la valeur de ce que l’on perd.