L’image est quand même saisissante : un skieur de fond pris la main dans le sac. Ou plutôt le sac dans le bras, via un tube, puis une aiguille. La nature dudit sac? Vous l’aurez compris : une poche de sang frais, au propre comme au figuré.
Dans la foulée de ce qui est désormais connu comme l’opération Aderlass -qui signifie « saignée »-, une poignée d’athlètes ont été arrêtés par la police autrichienne. Un réseau de dopage sanguin autour d’un médecin allemand a ainsi été démantelé. Ce beau monde risque la prison. Tout ça avec, en toile de fond, les mondiaux de ski de fond.
Voilà le contexte dans lequel deux cyclistes ont aussi avoué s’être adonné à la même pratique. Georg Preidler et Stefan Denifl ont été questionné dans la même affaire et ont été suspendus.
Ceci dit, quelqu’un est-il assez naïf pour croire que le dopage n’existait plus dans le cyclisme?
Tout le monde vous dira que les mentalités ont considérablement changé dans le peloton depuis la « belle époque » de l’EPO et des docteurs Ferrari et Fuentes. Il n’en reste pas moins que le dopage continue, encore, d’entacher ce sport auquel les commanditaires sont déjà passablement difficiles à attacher.
La chose qui m’ennuie, ici, c’est que jamais le passeport biologique de Denifl n’a montré de signe de dopage sanguin (Preidler dit avoir donné du sang mais ne l’aurait jamais utilisé). Et plus encore : si jamais il y avait eu irrégularité, Denifl aurait facilement pu obtenir gain de cause devant le tribunal sportif et continuer de courir. Car on a retiré ses dents à ce moyen de contrôle, « grâce » aux tribunaux. Ou alors ce sont les comités olympiques nationaux qui placent l’antidopage dans l’embarras, comme ce fut le cas avec Kreuziger.
Alors il reste la loi, les flics. D’autres tribunaux. Plus intimidants, ceux-là.
Je ne suis pas de celles et ceux qui déchirent leur chemise à propos du dopage. Je le trouve idiot, minable. Mais je le comprends. Je veux dire par là que, sans l’excuser, je saisis plus ou moins ce qui se trame dans la tête d’un athlète qui prend cette très mauvaise décision.
Mais nous n’avons plus le luxe d’en faire une affaire simplement morale. Ni même de discuter des motifs qui poussent un athlète jusque là. Sinon, ce sont non seulement des générations d’athlètes propres que nous sacrifions. À commencer par une relève, dégoûtée par ces pratiques qui lui subtilisent toute chance de compétitionner à égalité. Ajoutez à cela les craintes des commanditaires qui fuient le sport, ce qui le fragilise.
Si le seul moyen dissuasif est celui d’envoyer les flics à ces cons, alors allons-y. Encore. Et encore. Jusqu’à ce le refrain des portes du pénitencier, hurlé par Djeuuuunny, résonne dans tous les esprits tentés de tricher.