Quand la déprime covidienne me rattrape, je pense à Mike Woods. S’il y a quelqu’un qui nous a brillamment montré comment se relever quand on tombe, c’est bien lui.
Sauf peut-être pour les plus nantis de la planète qui ont profité de la pandémie pour s’enrichir plus encore, l’année 2020 a été dure pour tout le monde. Pour certains plus encore que pour d’autres.
Au moment où débutait le confinement, Michael Woods était étendu sur un lit d’hôpital. Rien à voir avec la Covid : le coureur de EF Pro Cycling (qui sera chez Israel Start-Up Nation en 2021) s’était fracturé le fémur lors d’une chute sur Paris-Nice. « Pendant un moment, j’ai même douté que je pourrais faire de la compétition à nouveau », a-t-il confié à VeloNews il y a quelques jours.
Puis, le monde entier ou presque a cessé de tourner. Pour tout le monde. Et pendant ce temps, comme nous, Mike se rongeait les sangs. Il en a profité pour voir grandir sa toute jeune fille en guérissant, puis en retrouvant la forme. Le 9 septembre, il remportait une étape sur Tirreno Adriatico, histoire de dire à son équipe qu’elle n’aurait sans doute pas dû l’exclure de son escouade du Tour. Fin octobre, il montait à nouveau sur la plus haute marche du podium lors de la septième étape de la Vuelta. La veille, il était arrivé second. En plus d’admirablement jouer son rôle d’équipier auprès de Hugh Carthy (3e au classement général de la course), il foulerait à nouveau la deuxième marche du podium une semaine plus tard.
Pour Woods, le confinement dû à sa blessure a été un moment d’introspection, de doute, de travail psychologique et physique : il lui fallait revenir à un niveau de forme impeccable, mais aussi retrouver la confiance nécessaire et l’esprit du coureur pour espérer gagner à nouveau.
Je déteste l’emploi du mot résilience à toutes les sauces. Reste que s’il fallait écrire un livre comme ceux de la collection de mon enfance « Un bon exemple de… », je voudrais que celui sur ladite résilience soit sur l’été 2020 de Mike Woods. Et comment on devrait voir son récit comme une métaphore de ce que nous vivons, plus ou moins en parallèle avec notre propre situation commune.
Je le disais, et c’est une évidence : l’année a été dure pour tout le monde. Je ne sais pas pour vous, mais je la termine extrêmement fatigué. La vie n’a pas cessé de nous envoyer des balles courbes pendant la pandémie, bien au contraire. Notre santé mentale a été mise à mal. L’isolement et l’impossibilité de voyager sont venus bousculer nos plans et nous mettre en quarantaine du cours normal des jours.
Se relever comme Mike
Mais quand je déprime, je pense à Mike. À son fémur fracturé. Je le revois sur le bord de la route, se tordant de douleur. Puis, victorieux, au Pays Basque, après avoir usé de ruse autant que de force brute.
Je réfléchis à la manière avec laquelle il a su se relever. Pour vous et moi, c’est bien de cela qu’il s’agit. Il nous faudra réapprendre à marcher. Pas pour gagner. C’est le travail de Mike, de triompher. Le nôtre, c’est d’accéder à un morceau de bonheur, une part d’insouciance, un peu de quiétude et de stabilité et de toucher à quelques certitudes. Tout cela nous parait aussi lointain et improbable que la victoire de Mike sur la Vuelta tandis qu’il était dans son lit d’hôpital. C’est pour cela que son histoire devrait nous servir de modèle. Comme une sorte de métaphore pour nous qui sommes en ce moment écrasés au sol.