Volatilité. C’est sans doute ce qui caractérise le mieux l’état du cyclisme professionnel, les coureuses et coureurs roulant presque constamment sous les nuages d’incertains auspices.
Ce qui s’est produit avec l’équipe de Raphaël Gagné en 2017 n’a donc rien d’inhabituel: «J’avais signé pour deux ans avec Cannondale 3 Rox, avec une option pour une troisième saison, et nous avons finalement su assez tard en saison que c’était déjà terminé.» L’équipe fermait les livres, et l’athlète se retrouvait sans contrat.
Pas une pointe d’amertume dans le ton du jeune trentenaire, même s’il souhaiterait évidemment que son milieu soit plus stable. On ne sent pas non plus qu’il la joue faussement optimiste pour son interlocuteur en évoquant avec une certaine légèreté les résultats décevants de la précédente saison. «Il y en a des bonnes et des plus difficiles. Chaque année, c’est différent, l’agenda et les objectifs bougent, le corps change, et on ne peut pas reproduire à l’identique les conditions des meilleures performances.» C’est-à-dire, dans son cas, une 6e place en Coupe du monde en 2015. Raphaël Gagné la rappelle sur un ton qui dit son brûlant désir de rebondir.
L’année dernière, les choses n’ont pas changé qu’un peu: après quelques semaines dans les limbes, il est devenu le premier Nord-Américain à signer avec l’équipe britannique OMX. Et son début de saison, Raphaël Gagné l’a abordé en participant à la plus difficile et prestigieuse course à étapes de vélo de montagne du monde: la Absa Cape Epic. Un des commanditaires majeurs de sa nouvelle escouade, Silverback, est un fabricant de vélos aux racines sud-africaines. Par conséquent, l’épreuve compte parmi les figures imposées au contrat de trois ans. «En fait, c’était prévu que je la fasse au moins une fois, mais ça ne devait pas être dès cette année. Les choses se sont alignées autrement.»
Drôle de manière de faire du volume: «Finalement, c’était un peu comme une Coupe du monde, sur le plan du rythme, mais pendant huit jours», résume-t-il au lendemain d’une semaine riche en rebondissements, le premier étant une crevaison quelques minutes après le départ de la seconde étape et le principal, son coéquipier, l’Allemand Martin Gluth, qui déclare forfait à deux jours de la fin. «J’ai donc terminé parmi les amateurs, seul. L’ennui, c’est que, oui, nous remontions chaque jour dans le classement après la crevaison, mais lorsqu’on ne finit pas en équipe, il n’y a pas de points UCI à la clé. Comme je ne suis pas du genre à abandonner, j’ai préféré poursuivre en solo.»
Encore cette idée de rebondir, ici. Tout est tellement complexe dans l’univers des athlètes professionnels, et les imprévus si nombreux, que la nature du sport les oblige à la résilience. Et puis après tout, rien n’est jamais tout à fait perdu: «Passer beaucoup de temps en tête de course, en compagnie des meilleurs, dans des conditions passablement difficiles, ça donne confiance.»
Raphaël Gagné n’en aura pas de trop, de confiance, pour atteindre les objectifs ambitieux qu’il se fixe, en attendant les Jeux olympiques de 2020: «Faire des top20 en Coupe du monde, c’est super, mais je vise des top 10, et même, pourquoi pas? des top 5.»
La recette? Toujours la même: chercher ce qu’on a fait de mieux aux moments les plus glorieux tout en ayant conscience qu’on ne peut pas faire du copier-coller d’une saison à l’autre, et gaspiller le moins d’énergie possible dans les nombreux déplacements qui ponctuent les épreuves et peuvent nuire à la forme.
Le cycliste de montagne croit cependant avoir trouvé le bon creuset pour opérer cette alchimie de conditions gagnantes. «Je l’avais perçu avant de l’intégrer : OMX est une équipe qui a du fun et fait les choses avec sérieux. Il y règne un très bon esprit d’équipe, comme j’en ai rarement vu auparavant.»
Depuis notre rencontre avec Raphaël, le coureur a gagné les championnats panaméricain et il a changé d’équipe.
Il a maintenant sa propre équipe, Team Raph, soutenu par plusieurs marques:
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