Je dois vous avouer que ça fait un bon moment qu’à Vélo Mag, on se pose cette question: peut-on aborder le sujet du vélo à assistance électrique – le VAE, pour faire plus court – dans les pages de Vélo Mag sans être perçus comme des cyclistes en fin de carrière? Les timides incursions que nous avons faites dans ce monde n’ont pas suscité de lettres d’insultes. Si la question posée sur Facebook provoque effectivement de vifs débats, le courrier reçu à la suite de l’annonce d’un dossier sur le sujet (lire en page 8) nous a mis la puce à l’oreille: les Homo sapiens qui chevauchent des VAE sont-ils de vrais cyclistes?
Le mieux, dans ce cas, est de s’y frotter. Nous avons donc roulé au cœur de l’été plusieurs modèles de vélos munis d’une assistance. Le constat le plus majeur: la perception des autres n’est pas la même. Finis les petits saluts de connivence entre cyclistes quand votre vélo est équipé d’un moteur. Les lecteurs qui nous ont envoyé un courrier l’ont bien compris: le VAE a du chemin à faire avant d’avoir son ticket d’entrée dans la grande famille des cyclistes.
C’est incontestablement une question de perception. D’ailleurs, là où le VAE a quelques longueurs d’avance, cette perception est fort différente. C’est le cas en Europe, et notamment en France, où le VAE fait figure de sauveur tant il a sauvé de la faillite des milliers de boutiques (90% d’augmentation de ventes entre 2007 et 2017).
Il faut dire qu’outre le soutien de l’État, quelques grands noms ont succombé aux charmes du VAE, le crédibilisant du même coup. Julien Absalon, collectionneur de maillots de champions du monde et de médailles olympiques en vélo de montagne, travaille avec le fabricant Moustache et se sert d’un VAE pour l’entraînement. Thomas Voeckler, qu’on ne présente plus, a organisé une cyclosportive ouverte aux VAE. «Ça permet à quelqu’un qui n’est pas forcément aguerri de participer à des cyclosportives à côté d’autres personnes qui utilisent un vélo traditionnel, de gravir des cols qui semblaient inaccessibles», a-t-il argumenté.
«Ça permet à quelqu’un qui n’est pas forcément aguerri de participer à des cyclosportives à côté d’autres personnes qui utilisent un vélo traditionnel, de gravir des cols qui semblaient inaccessibles»
Thomas Voeckler
On comprend que l’idée fasse plus facilement son chemin du côté des sentiers que du bitume; après tout, on aime le vélo de montagne pour le bonheur du pilotage autant que pour la quête de performance. Dans cet esprit, l’assistance électrique ne change rien. Côté route, le mot tricheur vient plus rapidement en bouche.
J’ai eu l’occasion de pédaler mes 64 km quotidiens avec un Opus WKND, un Specialized Vado et un vélo équipé d’une roue Copenhagen. À part l’impression d’être ralenti quand on dépasse le maximum légal de 32 km/h, ma semaine a été plus reposante et plus fluide. Bref, un VAE est mieux qu’une carte Opus. Côté sentiers, au cours d’une longue sortie, Félix a vidé son réservoir d’énergie musculaire alors qu’il restait 25% dans la batterie de son Rocky Mountain Altitude Powerplay…
Résultat de nos réflexions : chers assistés électriques, vous faites bien partie de la gang, et vous êtes les bienvenus.