La pandémie à bouleversé le calendrier des athlètes. Objectifs flous. Incertitude totale. Nous en avons joint quelques-uns afin qu’ils nous racontent comment ils vivent ce hiatus forcé, alors qu’ils roulent vers l’inconnu. Comme nous, d’ailleurs.
Ariane Bonhomme s’entraînait avec l’équipe canadienne de poursuite sur piste lorsque nous l’avons jointe une première fois. Les frontières se fermaient alors une à une, mais le report (ou l’annulation) des Jeux olympiques n’avait pas encore vraiment été envisagé.
La pistarde gatinoise de 25 ans avait terminé 8e en poursuite individuelle aux Championnats du monde à Berlin, quelques semaines plus tôt. Son équipe, elle, s’était (mé)contentée d’une 4eplace. Malgré la déception, l’équipe regardait vers l’avant. Un nouveau coach et des apports technologiques importants faisaient leur œuvre. Jusqu’à ce que le report des Jeux brise leur élan, pendant que les filles s’entraînaient à Victoria.
«Ça a été difficile au début, mais je comprends la décision, tempère celle qui a aussi terminé 3e aux derniers championnats canadiens sur route. Aussi, je crois que ce sera bon pour nous d’avoir une autre année à travailler avec notre nouveau coach. Nous étions prêtes, mais nous le serons plus encore! Pour l’instant, par contre, nous n’avons pas de plan. Tout le monde s’entraîne à la maison.»
Pour ce qui est de Karol-Ann Canuel, son directeur sportif l’a appelée au moment où elle s’apprêtait à monter dans l’avion qui devait la mener vers les Strade Bianche, en Toscane, pour lui dire que l’équipe n’en serait pas. Le lendemain, la course était annulée, l’Italie sombrant dans la crise sanitaire. Quelques jours plus tard, la coureuse de la Boels-Dolmans fuyait l’Europe pour revenir au Canada.
Frédérique Larose-Gingras, quant à elle, «espère que la saison ne sera pas entièrement annulée », puisqu’elle comptait à son calendrier plusieurs épreuves européennes avec l’équipe Macogep-Tornatech, dont elle fait partie (ainsi que ses deux jeunes sœurs Juliette et Mireille). «En attendant, je m’entraîne sur Zwift en suivant les recommandations de mon coach, Bruno [Langlois], raconte la coureuse de Québec. Le moral est bon. Et si la saison est annulée, je reviendrai plus forte l’an prochain!»
L’après Paris-Nice
Les professionnels québécois qui participaient à la course Paris-Nice en conservent un souvenir d’étrangeté. Dans une entrevue accordée au balado cycliste Radio Bidon, Antoine Duchesne parlait d’une ambiance bizarre, alors que toutes les autres courses avaient été annulées et que, chaque jour, les coureurs ignoraient s’ils allaient reprendre au matin suivant. Assigné à résidence chez lui en France, le coureur de la Groupama-FDJ a finalement retrouvé le sol québécois.
Il avait été précédé par Guillaume Boivin, qui s’est réfugié chez ses parents à Bromont et s’amuse depuis à quadriller les chemins de terre estriens. «Au moins, ici, on peut rouler dehors, se réjouit le coureur de l’Israel-Start-Up Nation, qui en profite pour partir à l’aventure et faire du volume sans trop de structure pour le moment. «C’est dur, mentalement, de faire de gros efforts quand tu ne sais pas vers quoi tu vas.»
«J’en profite pour travailler sur mon après-carrière de pro», nous confie Guillaume, qui souhaite devenir agent d’athlètes. Il saisit l’occasion d’acquérir les préalables exigés dans sa formation en gestion de carrière.
Hugo Houle, lui, contemple la principauté de Monaco du haut de son balcon. Le Monégasque de récente adoption s’entraîne à la maison. «Après Paris-Nice, j’ai fait la coupure durant 10 jours, comme en fin de saison, raconte-t-il. Là, je fais de la musculation, une heure et demie à deux heures de home trainer, donc des entraînements spécifiques, en qualité plutôt qu’en quantité. Pas de trucs de fou, à rouler plus de quatre heures sur le rouleau.» Puis il profite de l’heure quotidienne de marche accordée aux résidents du coin. «Mais je m’emmerde un peu quand même», avoue-t-il.
Comme l’ensemble des coureurs et coureuses interrogés, Hugo Houle prend la chose avec philosophie. «C’est hors de mon contrôle, tout le monde est dans le même bateau.»