C’est un peu comme le Plateau Mont-Royal sous les tropiques. Des bicyclettes partout, des rues étroites, zéro gratte-ciel, pas assez d’espace pour les voitures. Et une culture vélo bien ancrée et vivante. Bienvenue à Key West.
L’ouragan Irma y a fait beaucoup moins de dommages qu’ailleurs dans les Keys, cet archipel de centaines de récifs coralliens à l’extrémité sud de la Floride. Irma a frappé moins fort que l’ouragan de la fête du Travail de 1935, qui a fait des centaines de victimes, notamment chez les travailleurs du chemin de fer reliant Miami à Key West, qu’il a détruit. On peut encore admirer ces impressionnantes structures, autrefois qualifiées de huitième merveille du monde, et rouler sur des tronçons convertis en pistes cyclables.
Aujourd’hui, les Keys sont reliés par les ponts de la route 1, dont un de 14 km entre Little Duck Key et Marathon. C’est le préféré des cyclistes, dit-on, malgré la circulation infernale.
Le plaisir est surtout à 100 km au sud. Oubliez les attrapetouristes que sont le monument marquant la (fausse) extrémité sud des États-Unis ou la rue Duval et ses boutiques de babioles, clubs de drag queens et bars style Vieux Pierrot. Le charme est ailleurs.
Key West fait 13 km2. Moins de 23000 personnes y habitent. À 1769 habitants au kilomètre carré, c’est très peuplé. On est loin du Plateau (12394 habitants au kilomètre carré), mais dès qu’on circule dans le damier des rues de la République de Conch, dixit son surnom bahaméen, on réalise qu’ici, la terre ferme est une denrée rare.
L’île est plate. Outre les 6 m de Solares Hill, les seules protubérances sont les dos-d’âne À part les rues Bertha et Whitehead, les avenues Flagler et Palm ainsi que le boulevard Roosevelt, il n’y a aucun axe majeur. La ruelle est reine. Les rues importantes ne comptent que deux voies. Certaines venelles ne mènent nulle part et sont souvent d’une largeur de trottoir. Spécialement autour du cimetière et sa Passover Lane.
Dans cette petite ville fréquemment écrasée sous une chaleur épouvantable, le vélo est roi. Le stationnement est rationné dans nombre de quartiers. Les rues sont la plupart du temps à chaussée partagée. Toutes les maisons ont un, deux, six vélos, habituellement déverrouillés. Certes, l’île doit composer avec de nombreux embouteillages. Mais la bicyclette façonne davantage la culture locale. La municipalité a même son agence de promotion des transports actifs, Car-Free Key West, au slogan limpide: «La vie à portée de pédale et de marche.» Sur son site web, un organigramme vante les avantages économiques et sociosanitaires du vélo, signé… Vélo Québec
«À Key West, un vélo est une déclaration personnelle qui va au-delà du transport», affirme la journaliste locale Nancy Klingerner. L’île est un véritable musée vivant de la bicyclette: les montures chères et à la mode sont rares. On préfère les modèles yougoslaves, les vieux CCM à pneus larges et les sièges banane
Le grand plaisir de Key West, c’est de se perdre à vélo dans le dédale de ses rues et de savourer un latte inoubliable à une des deux enseignes du Cuban Coffee Queen, bien avant de visiter la maison d’Ernest Hemingway ou la serre à papillons.
Key West
3,8 millions de touristes injectent 2 milliards de dollars dans l’économie locale, faisant ainsi vivre la moitié de la population.
- Key West fut repérée par le conquistador espagnol Juan Ponce de León en 1521 et fondée en 1828.
- Ernest Hemingway et Tennessee Williams y ont écrit, Michel Tremblay et Marie-Claire Blais y passent l’hiver.
- Les coqs, nombreux, circulent librement sur l’île et sont protégés par la loi.
- Durant la guerre de Sécession, Key West la méridionale était rattachée aux États nordistes. L’île compte des monuments des deux camps, côte à côte.
- 150 km: distance entre Atlantic Boulevard de Key West et le Malecón de La Havane; 260 km: distance entre Key West et Miami.