Les scientifiques évaluent l’intérêt des méthodes d’entraînement en mesurant leur effet sur la consommation maximale d’oxygène (VO2max). Le VO2max reflète l’aptitude du système cardiorespiratoire (poumons, cœur, circulation sanguine, muscles, etc.) à faire du travail musculaire prolongé. Aucune recherche ne montre qu’on peut augmenter son VO2max en s’entraînant à moins de 50% du VO2max. On franchit généralement ce seuil dès lors que la fréquence cardiaque est d’au moins 120 à 130 battements par minute.
On a de bonnes raisons de croire que la meilleure intensité d’entraînement pour améliorer le VO2max est justement celle correspondant au VO2max, c’est-à-dire à peu près l’intensité de pédalage que vous pourriez maintenir pendant une course contre la montre de 3 ou 4 km, soit un effort maximal d’environ 5 min. Pour maximiser le temps de pédalage à intensité aussi élevée, on fait des séances d’entraînement par intervalles, par exemple trois séries de 5 ou 6 fractions d’effort de 1 min, avec 2 min de récupération active (mouliner doucement) entre les répétitions, et 5 min entre les séries. On cumule ainsi au moins 15 min à intensité cible.
Mais que penser des intensités encore plus élevées de pédalage, par exemple celles qu’on atteint pendant des sprints de quelques secondes seulement? On a cru jusqu’à tout récemment que des pointes d’effort aussi violent n’avaient aucun effet sur l’aptitude aérobie. Mais on avait tout faux ! Le professeur Martin Gibala, de McMaster University, a mesuré l’endurance de 14 sujets en excellente condition physique avant et après une période d’entraînement comprenant des séances de seulement 4 à 8 sprints d’aussi peu que 30 s (récupération passive de 4 min entre les fractions d’effort). Le test d’évaluation de l’endurance consistait à tenir le plus longtemps possible une intensité de pédalage correspondant à 80% du VO2max. En moyenne, cette mesure de l’endurance est passée de 26 à 51 min. Impressionnant ! Une recherche menée par le professeur Peter Lemon dans un autre laboratoire ontarien a révélé qu’on peut obtenir des gains aussi importants de l’aptitude aérobie avec aussi peu que six séances (en deux semaines) de 4 à 8 sprints à intensité maximale de seulement 10 s (récupération de 2 ou 4 min) !
Plusieurs personnes croient encore que pour maigrir, il faut éviter de s’entraîner à intensité trop élevée. Il est vrai qu’à plus d’environ 90% du VO2max – c’est à peu près l’intensité d’une course contre la montre de 15 à 20 km –, les muscles n’oxydent que des glucides (sucre) et pas de lipides (graisse). Mais en réalité, pendant les heures qui suivent une séance intensive où on a oxydé surtout des glucides, on métabolise davantage de lipides. En fin de compte, pour le poids corporel, tout ce qui compte, c’est la différence entre les calories dépensées et les calories ingérées.
Chaque fois qu’un sportif décède subitement pendant l’effort, il en est beaucoup question dans les médias. Et cela nourrit le mythe qu’on risque sa vie quand on se pousse à fond. Il est vrai que certaines personnes ont une mauvaise santé cardiaque et sont donc plus à risque de mort soudaine (au repos comme à l’effort), mais cette contre-indication touche surtout les personnes sédentaires. En réalité, ce qui est nocif pour la santé, c’est de ne pas faire d’activité physique ! À moins d’indication médicale contraire, on peut donc effectuer des séances d’entraînement comprenant des pointes d’effort à condition d’avoir préalablement suivi une longue et lente progression dans l’intensité et le volume des efforts.
Se motiver à se donner
Face à la douleur liée à l’effort, certains cyclistes chevronnés utilisent une stratégie associative : ils se concentrent sur la douleur pour mieux gérer leur intensité de pédalage. Mais la plupart optent pour une stratégie dissociative : ils cherchent à oublier la douleur en se concentrant sur un élément particulier, par exemple leur rythme respiratoire, ou ils répètent sans cesse une phrase motivante ou un mantra hypnotisant.
Effet anti-inflammatoire du massage
La majorité des recherches ne révèlent aucune amélioration de la performance cycliste après un massage. Et pourtant, se faire masser – une stratégie de régénération cycliste plus ancienne que le dérailleur ! – fait tellement de bien, surtout après une sortie endiablée ! Une recherche récente indique qu’un bon massage réduit l’inflammation qui sévit dans les muscles quand ils sont surmenés, un peu comme un anti-inflammatoire qu’on trouve en pharmacie, mais aux effets secondaires ô combien plus doux ! Après un exercice intense, 11 sujets ont profité d’un massage, mais pour une seule de leurs jambes, l’autre servant de témoin. L’analyse des prélèvements d’échantillons de muscle des cuisses par biopsie avant et après le massage révèle que ce dernier déclenche toute une série de processus physiologiques réduisant l’inflammation. Les cellules musculaires de la jambe massée avaient récupéré plus rapidement. Comme quoi la recherche confirme parfois le bien-fondé d’éléments clés du folklore cycliste !
Source : Science Translational Medicine, 2012