Durant la planification d’un long voyage à vélo en famille, la question de l’école devient inévitable. Plusieurs familles hésiteront même à partir, préoccupées par cette question. Est-ce chose possible? La réponse est oui. La famille qui s’est joliment baptisée «Les biclous lâchés lousses » nous explique comment.
Les biclous lâchés lousses, c’est moi, Julie, mon conjoint, Valéry, et nos deux filles, Maëlle (8 ans) et Émilie (10 ans). Nous sommes partis rouler à vélo autour du monde pendant deux ans. Nous avons sillonné une partie des États-Unis, l’Europe centrale (de la Grèce à la Suède), la Turquie et l’Asie du Sud-Est (Thaïlande, Cambodge, Laos et Vietnam), soit un total de 16 000 km dans 19 pays sur trois continents. Maëlle et Émilie vont réintégrer en septembre prochain leur école et, nous vous rassurons, elles n’auront pas à reprendre leur programme scolaire des deux dernières années. Nous aimerions vous faire part de notre expérience : quelles sont les différentes étapes pour réaliser pareil voyage en famille et comment le vélo peut faire bon ménage avec l’école.
PREMIÈRE ÉTAPE : PRÉSENTER LE PROJET ET S’INFORMER
Il est d’abord essentiel de parler de votre projet avec la direction de l’école que fréquentent vos enfants. Il faut également aller chercher de l’information auprès de la personne responsable de l’enseignement à la maison au ministère de l’Éducation. Différentes options peuvent s’offrir à vous en fonction de la durée du voyage et de la période dans l’année. Comme nous partions deux ans à l’extérieur du Québec, nous n’étions pas tenus d’envoyer un avis au ministère et au centre de service scolaire pour faire l’enseignement à la maison et il n’y avait aucune autre démarche ou aucun suivi à effectuer, car nous serions hors de la juridiction du Québec. Les filles seraient simplement intégrées à l’école à leur retour, selon leur groupe d’âge.
Il peut être intéressant de parler aussi de votre projet aux camarades de classes de vos enfants avant votre départ. C’est une belle manière de maintenir les liens, et les élèves aimeront en apprendre davantage sur différents pays. C’est tellement facile aujourd’hui avec toutes les plateformes en ligne. C’est aussi un bon moyen de ne pas oublier de faire les inscriptions à temps pour le retour à l’école à la fin du voyage !
DEUXIÈME ÉTAPE : CONNAÎTRE LE PROGRAMME SCOLAIRE
Il faut s’informer sur les connaissances essentielles que vos enfants doivent acquérir afin de faciliter leur intégration au retour. Sur le site du ministère de l’Éducation, vous avez accès au programme de chaque niveau (ordre d’enseignement). Par la suite, vous pouvez choisir le matériel que vous souhaitez utiliser pendant votre voyage. Plusieurs parents décident de faire l’école à la maison sans nécessairement partir en voyage et il est donc maintenant plus facile d’obtenir des conseils et des idées dans des groupes de parents ou sur des sites consacrés à ce sujet. Il existe aussi en librairie plusieurs publications et cahiers qui vous accompagneront dans votre démarche.
Il n’y a pas de formule meilleure qu’une autre ; il suffit simplement d’en trouver une qui vous convient, qui sera motivante pour vos enfants et qui ne prendra pas trop de place dans vos bagages ! De notre côté, nous avons choisi d’inclure le plus possible de notions scolaires dans notre quotidien à vélo.
TROISIÈME ÉTAPE : SÉLECTIONNER LE MATÉRIEL SCOLAIRE
Pour ce qui est du matériel scolaire nécessaire, le défi est qu’il soit peu encombrant, pas trop lourd et utile pour différents niveaux. Nous avons opté pour deux étuis contenant différentes sortes de crayons (feutres, bois, aquarelle…), une tablette à dessin, un carnet d’écriture et un autre pour les mathématiques. Tout ce matériel a le mérite d’être facilement renouvelable. Par chance, nos filles lisent les mêmes livres, donc elles peuvent les échanger. Nous avons ajouté une liseuse en cours de voyage, car c’est parfois difficile de trouver des livres en français à l’étranger.
Chacune de nos filles possède sa tablette dans laquelle sont conservées des photos de leurs travaux. La tablette permet aussi de garder le lien avec la famille et les amis. Enfin, un autre indispensable selon nous : des jeux de cartes. Ils nous permettent non seulement de passer du bon temps ensemble en fin de journée, mais sont une mine d’or pour les apprentissages stratégiques et mathématiques… et prennent peu de place !
LA ROUTINE QUOTIDIENNE : EST-CE QU’IL Y EN A UNE ?
Le cyclotourisme est hyper stimulant, mais demande aussi beaucoup d’adaptations quotidiennes. Peu importe l’âge des enfants, la routine scolaire est rassurante et donne l’occasion aux enfants de développer leur autonomie et de s’impliquer plus facilement dans le quotidien du voyage.
Nous consacrons environ deux heures par jour à l’enseignement. Le matin, le temps est divisé entre le rangement, la lecture et les jeux. Nous nous renseignons aussi sur notre trajet et les visites possibles.
Plusieurs apprentissages se font naturellement pendant que nous roulons. Qu’il s’agisse de rencontres, de lieux ou de belles surprises qu’offre la nature, comme l’observation d’une tortue ou d’un cerf, nos filles sont constamment stimulées. De plus, nous saisissons toutes les occasions pour parfaire les connaissances dans plusieurs matières : mathématiques, histoire, géographie, anglais, etc. Maëlle et Émilie notent des observations intéressantes et prennent des photos. C’est très utile pour la rédaction de leur journal quotidien.
En milieu d’après-midi, un des parents installe le campement alors que l’autre enseigne les notions scolaires prévues. En soirée, nos filles rédigent leur journal, nous jouons souvent aux cartes et nous lisons. Un moment peut aussi être consacré aux communications (courriels, appels vidéo) lorsque nous avons accès à Internet. Nous nous sommes assurés avant de partir que nos filles étaient connectées sur leur tablette avec leurs amis et les membres de la famille.
Nous prenons aussi un moment régulièrement pour prendre des notes sur leur progression. Nous gardons des photos ou des vidéos des activités réalisées et des travaux en vue d’un suivi possible avec l’école. Nous les rassemblons dans un portfolio numérique.
L’adaptation à un nouveau mode de vie, le temps pour se rendre à telle ou telle destination, la fatigue, les rencontres, les nouveaux amis, la météo… Il est fort probable qu’à certains moments la routine sera difficile à préserver et représentera un plus grand défi. Je crois qu’il faudra simplement vivre le moment présent, avec ouverture et dans l’accueil des changements. Les congés, ça existe aussi en voyage ! En ce qui nous concerne, nous avons pu observer combien les « apprentissages humains » ont constitué une richesse pour nos filles : capacité d’adaptation, gestion des émotions, persévérance, empathie, autonomie, collaboration, bienveillance, et j’en passe. La clé est de faire confiance aux enfants et de croire en leur capacité à développer leur plein potentiel !